Donc voilà, c'est fait, une première sortie sur cent kilomètres. Une
première expérience dans le monde du vrai
long. C'est un monde à part, c'est sûr. Et il est possible que je ne
retourne pas dans ce monde du “grand ultra” avant au moins une bonne année...
mais ça, c'est une autre histoire...
le team, avant le départ
Le TrailWalker a été créé il y a trente ans, à l'origine il
servait comme parcours d'entrainement pour l'armée chinoise, mais plus
récemment il a été transformé en un grand évènement pour la charité
internationale Oxfam. Le parcours suit le fameux trail de MacLehose et le but pour la plupart des personnes qui s'alignaient
au départ samedi matin était de terminer en dessous des 48 heures, c'est à dire
deux jours et deux nuits de course. Normal dans l'ultra, apparemment !..
D'accord... D’un point de vue personnel, avec toutes ces longues courses, le
plus vite elles se terminent, le moins longtemps la douleur dure. Il ne faut pas
rendre une chose déjà très longue et douloureuse... encore plus longue et
douloureuse. Il faut donc essayer de terminer aussi vite que possible, sans
trop se “tuer” sur le chemin. Pas forcément une stratégie évidente à mettre en
place !
Le trail de MacLehose se situe seulement quelques kilomètres au
nord de Hong Kong. Ce qui m'avait vraiment impressionné lors de nos premiers
repérages était la nette limite entre le gris de la ville et le vert de la
forêt. Vue des collines qui dominent la ville, la barrière entre la zone
constructible et la zone non-constructible ne pourrait pas être plus évidente.
Les tours s'arrêtent et les arbres commencent. Il n'y a pas de zone tampon,
aucune transition entre les deux. Ici, soit tu construis grand et très très
haut, soit tu ne construis pas. Une petite maison avec jardin en banlieue ? Ça
n'existe simplement pas, désolé.
trail et ville
Nous courrions donc sur ce trail qui part de l'Est et va vers
l'Ouest, juste au nord de la ville. Un bruit de fond monotone - des milliers de
véhicules qui circulent en contrebas, et un panorama impressionnant des
constructions monstrueuses, souvent cachées par les arbres. Coté sud : de
l'acier, du verre, du béton. Coté nord : des énormes réservoirs et derrière la
mer. Certes Hong Kong ne compte pas de grands espaces verts intra-muros, comme
on a l'habitude de les trouver dans les cités européennes, mais en même temps
les habitants ont la chance d'avoir un accès très facile à ce grand espace naturel,
vide de construction. En l'espace de trente minutes, et pour le prix d'un bol
de riz, tu peux t'y échapper, et là tu seras tranquille, éloigné du trafique et
personne ne voudra te vendre une fausse Rolex tant que tu restes sur le trail.
il faut être détendu avant un ultra
Sur le sentier, la forêt est dense et les paysages sont variés,
mais le trail en lui-même est dur, très dur...non en terme de difficulté mais
en terme de qualité de surface. En fait il ne pourrait pas être plus dur. Sur
les 100km il y a quelques sections en terre, mais la grande majorité du trail
est construite de pierres, de gros blocs de rochers entassés en marches
uniformes, ou même des dalles de béton. La grande partie des premiers
kilomètres passe sur des aqueducs qui doivent alimenter les réservoirs d'eau fraîche en-dessous. Du béton, il y en avait beaucoup. Oui, tu es en nature, il
y a des arbres sur ta droite et sur ta gauche, des singes traversent le sentier
de temps en temps (ils espèrent te voler ton gel bio à la banane, qu'il vaut
d'ailleurs mieux cacher de leur vue), mais après, la nature s'arrête. Tu as
qu'à regarder tes pieds - ce trail est 100% man-made.
silence dans le parc
Donc parlons de la course. Et bien...c'était dur. C'est la fin de
la saison et personne n’était très “frais”. J'étais venu à Hong Kong pour faire
partie d’une équipe qui est, “sur le papier”, de très haut niveau. Un team
comprenant des meilleurs coureurs de longue-distance en France. Je ne vais pas
lister les palmarès, les noms suffisent : Francois D'Haene, Julien Chorier,
Michel Lanne. Ils sont tous très rapides et très très costauds. Une équipe de
rêve pour ce genre d’évènement Mais, en même temps, il est mi-novembre, nous
sommes tous un peu fatigués de nos longues saisons respectives. Avec tous les
kilomètres horizontaux et les mètres verticaux que nous avions déjà dans les
jambes, cette course allait toujours être un challenge de survie. Il fallait survivre.
La gestion de l'équipe, l'encouragement entre coéquipiers et une bonne
assistance étaient l'ordre du jour. Des cordes ont été utilisées régulièrement pour
se tracter les uns les autres pendant les moments de faiblesse et nous avons
tous dû batailler jusqu'à la ligne d'arrivée. L'équipe Népalaise (Colombia)
ainsi que Team Salomon Hong Kong ont mis la pression dès le départ en imposant
une allure impressionnante. Les premiers dix kilomètres étaient bouclés en 44
minutes. Nous avons dû vraiment travailler ensemble et se battre jusqu'à la fin
pour franchir la ligne d’arrivée avant eux. Nous avons réussi, mais cela n’a vraiment
pas été facile !
section de jungle
Une dernière petite surprise nous a temporairement fait oublier
l'état de nos jambes. A cinq kilomètres de l'arrivée, on aperçoit un serpent.
Il est sur la droite du sentier et nous devions passer à gauche, le piégeant
entre la terre qui monte et nos petites jambes. C'est exactement ce qu'il ne
faut pas faire - piéger un serpent qui peut tuer un tigre, le mettre en positon
de danger. Il ne faut juste pas le faire. Néanmoins nous n'avions pas trop le
temps de réfléchir aux options et nous avons foncé sur la gauche comme s'il
s'agissait d'un petit animal tout mignon. Pour la petite histoire, il y avait
aussi un lac sur la gauche, un peu en dessous du niveau du sentier. Nous avons
longé ce lac pendant trois quarts d'heure, mais en discutant ensuite, Julien
nous a avoué ne pas avoir été conscient du tout de la présence d'un lac ! Je
pense que ça montre clairement l'état dans lequel nous étions !
Pour revenir au
serpent, Ford (Salomon Singapour) et Hai (Salomon Hong Kong), qui nous
montraient le chemin sur les 15 derniers kms de la course, ont eu la sagesse de
ne pas nous dire que le serpent en question était un cobra avant que nous le
dépassions...
Après l’épisode du serpent, nous montons une dernière bosse, bien
sûr plus grande que sur le profil du parcours, et puis une dernière descente
d'un ou deux kms sur la route. Et comment on était tous content de mettre une
fin à ce périple ! Au final on a mis un peu plus de onze heures. Je ne sais pas
ce que tu en penses, mais pour moi onze heures - ça fait long quand même.
Presque aussi long que le vol Paris - Hong Kong d'ailleurs. On se félicite, on
s'assoie, on se douche, puis on mange...on mange...on mange... Après tout,
c'est la vie d'un ultra runner - il faut courir et manger, courir et manger,
c'est simple.
c'est bien d'être arrivé
Toutes les infos / statistiques sur la distance, profile, cœur etc.. sont dispo ici sur Movescount.
Je voudrais finir par remercier tous ceux et celles qui ont rendu
notre séjour si agréable et la semaine aussi intéressante. Un grand bravo à
Oxfam et à toute l'équipe qui organise cet évènement incroyable tous les ans.
Je ne vais pas l'oublier, c'est sûr. Le retour en Provence est un choc. Le
retour au calme (je ne parle pas des enfants là) - j'ai hâte !..
Hello,
ReplyDeleteFélicitation pour cette belle victoire en équipe. Ton récit est bien plaisant, bravo.
"Le retour en Provence" me fait le même effet que toi, quand je retourne voir mes parents à Cabannes (à 10kms de Châteaurenard), tu dois connaitre, non ? ;-)
A+, bonne récup
Will